"Amusant... ton discours est mordant, méchant, et pourtant tu as juste mal compris mes propos. Il se trouve en réalité que je parlais du sommeil. En effet, tu semble être tant absorbée par ton apparence qu'en bon ami que je suis, je me permet de te conseiller de monter te coucher. Un physique soumit à un régime aussi strict qu'il semble l'être peut se retourner en une nuit de manque de sommeil." il soupira un instant "je me fais juste du soucis tu comprend..? Je ne voudrais pas que tu sois dans l'incapacité te servir de celui-ci pour parvenir à tes fins auprès des gens ordinaires.."
Un sourire discret se dessina sur ses lèvres.
"Si ma présence ne te conviens pas, va-t-en ! Va t-en plus loin, quitte ces jardins, fais quelque chose, mais ta tourmente tu peux la ravaler. En tout cas moi, je ne bougerai pas".
C'était définitivement sa plus belle réplique de toute la soirée. Il était fasciné par tout ce qui pouvait sortir d'entre ses lèvres. Cela atteignait parfois des sommets tels que Henry en venait à se demander si elle était réellement consciente de ce qu'elle pouvait dire.
- "Écoute..." un nouveau soupire, plus profond, quitta ses entrailles.
Il s'avança jusqu'à elle, la plaqua fermement contre l'arbre auquel elle était déjà adossée, garda sa main droite posée sur son épaule tandis que l'autre s'aventurait une fois de plus sur sa hanche.
Il se sentit alors plus calme et pu reprendre avec davantage de douceur :
- "Avant toute chose, avant de rétorquer violemment, envisage toutes les possibilités. Ensuite, je vais éviter de m'engager sur le terrain du (il prit une voix grotesque et enfantine) "j'ai été là avant toi"; alors je serais contraint d'admettre que j'aurais été plus près du sol que tu l'as été dans l'ensemble de cette soirée. Enfin, et c'est bien là qu'il me semble sage de nous séparer, je t'invite à quitter cet endroit."
Il était évident qu'elle avait à elle seule décidé de semer le trouble en cette agréable nuit (c'est telle qu'elle pouvait être définit avant son intrusion) et qu'elle devait en conséquence quitter les lieux à sa place.

Elle grimaça lorsqu'il la plaqua fermement contre l'arbre où elle était, en plus du tact, il était loin d'être une brute.. Il avait decidemment tout pour lui. Elle sentit les doigts du jeune homme parcourir sa hanche et y trouver une place bien chaude où ils s'attardèrent à nouveau. Elle essaya de rester le plus calme possible aux vues de la situation.
Elle l'écouta parler.. bla, bla, bla. Moulin à vent. Inutilité. Perte de temps. Perte d'énergie. Elle décrocha une seconde, agacée qu'il soit si près d'elle et que surtout, il la touche.
Une fois qu'il eut terminé, elle le regarda droit dans les yeux et prit une moue désolée.
"Oh excuse moi, tu as parlé peut-être.. ? Etait-ce ta voix ? Cet espèce de son insupportable qui parasitait les alentours ?"
Elle haussa les épaules et reprit un air ironique.
"Hm.. Si c'était le cas, ce que tu avais à dire ne devait pas être important."

- "D'une facilité déconcertante. Je ne m'attendais guère à mieux venant de ta part, la réponse atteint un seuil de puérilité qui ne m'étonne plus."
Ses mains ne bougèrent pas, il était là, planté devant elle. Leur regard étaient plongés l'un dans l'autre. Sa main gauche se resserra délicatement sur sa hanche, plus qu'elle ne l'était déjà.
Une arrivée soudaine de chaleur lui fit gonfler les poumons de façon inhabituelle. Renouvellement d'une faiblesse qui l'avait quitté bien plus tôt. À nouveau cette situation, elle. Il devenait instable, il le sentait clairement.
Ses yeux se baissèrent jusqu'à la taille de la jeune fille, et remontèrent spontanément jusqu'à ses lèvres où il s'attardèrent quelques micros-secondes qui semblèrent être si longues que sa déstabilisation s'amplifia deux fois.
Il lâcha alors prise et tourna le dos à celle qu'il tenait entre les doigts à l'instant.
- "Très bien."
Voici les deux mots qu'il laissa s'échapper avant de prendre la direction de la porte menant aux couloirs de l'académie. Sa présence l'avait d'abord agacé, puis véritablement ennuyé; désormais c'était tout cela réunit mais il sentait également une incroyable gêne de son côté comme de celui de la jeune Loupocan. Il décida donc d'abandonner cette querelle enfantine cherchant à démontrer qui aurait la chance d'avoir le dernier mot et, pour la première fois, contraint de le faire, il laissa l'étudiante profiter de cette victoire par abandon.
À chaque pas le rapprochant de l'intérieur, il éprouvait des regrets dont l'origine lui était inconnu.

Ils se regardèrent longuement après cet échange et elle ne pu s'empêcher de remarquer que les doigts du jeune homme s'étaient étroitement et délicatement resserrés sur sa hanche, lui procurant un frisson qui la parcouru du bas ventre jusque dans la nuque. Elle ne voulu montrer aucun signe de faiblesse et continua à le fixer d'un regard sévère.
"Très bien"
Elle haussa les sourcils, surprise qu'il lâche prise aussi facilement, convaincue d'avoir à faire à une réelle tête de mûle.
"Quoi, c'est tout ?" murmura t-elle en pensant tout haut.
Elle se dégagea du tronc de l'arbre sur lequel elle s'était appuyée et sur lequel il l'avait tenue prisonnière l'espace de quelques instants et le regarda partir le visage déçu. Elle fit un pas sans le vouloir mais se ressaisit la seconde qui suivit. Que lui arrivait-il ? Cet élan laissait supposer qu'elle avait été sur le point, inconsciemment, de le rattraper. Pourquoi ? Elle n'attendait que ça, qu'il s'en aille. Qu'il parte loin d'elle. Qu'il la laisse tranquille. Au final, elle se sentait encore plus seule que lorsqu'elle était arrivée. Elle fronça les sourcils et s'assit dans l'herbe, contre le tronc d'arbre à nouveau. Nuit étrange.

Le léger vent qui circulait avait suffit à effacer les mots qu'elle avait abandonné au fur et à mesure que la distance augmentait, si bien que Henry ne pu en récolter que quelques sons ne formant aucune phrase distincte.
Il semblait donc que c'était terminé.
Arrivé à la porte, il se retourna. La jeune Loupocan s'était installée dans l'herbe, le dos toujours contre le même arbre. Elle semblait autant ennuyée que lui, pourtant elle demeurait là, à même le sol. Du peu qu'il avait vu d'elle cette nuit, il savait pertinemment qu'elle ne le rattraperait pas; pourtant il ne pouvais se tromper lui-même et se décevait à avoir imaginé le contraire, à l'avoir même désiré.
Il resta un instant contre cette pièce en bois massif qui refermait les secrets du palais, ses yeux à mi-chemin entre lui et la jeune fille. C'était l'instant de la dernière chance; il n'était pas sûr de ce qu'il faisait mais se laissait aller pour la première fois à un sentiment extérieur.
*Quelques secondes, pas une de plus* se répétait-il.
Pas une de plus.

Elle lança un dernier regard dans la direction du jeune homme avant qu'il ne s'engouffre par la porte en bois massif et fut surprise de constater qu'il restait planté devant, songeur. Elle fronça les sourcils, se demandant ce qu'il allait encore lui lancer comme atrocité, mais il n'en fit rien.
Elle attendit alors patiemment de voir ce que le jeune Falconia allait décider de faire. Qu'etait-il en train de se tramer entre eux deux ? Que se passait-il ? Ils se rejetaient, se repoussaient, s'éloignaient, se détestaient, mais semblaient se désirer inconsciemment. Elle secoua légèrement la tête pour chasser cette idée tordue de son esprit. Jamais elle n'éprouverait du désir pour un type comme lui. Au fond, elle ne savait même pas si elle éprouverait un jour du désir pour quelqu'un. Au final, elle ne savait même pas ce que c'était, de ressentir un désir profond.. comment pouvait-elle nier l'évidence de cette nouvelle sensation qui s'était engouffrer en elle à l'instant où il l'avait plaqué contre l'arbre et posé ses mains sur elle ? Le souffle court, le frisson qui l'avait parcouru, cette sensation dans le ventre qui l'avait clouée.. Non.. ce n'était pas possible.

Rien. Il ne se passait rien. Le fait qu'il ait décidé de rester planté devant cette porte renvoyait la balle à la jeune Loupocan, et qu'elle ait demeuré figée en disait long sur l'issue de cette nuit.
L'avantage fut que le jeune homme reprit finalement ses esprits petit à petit, il avait reprit conscience de la situation et de ce qu'il aurait été capable de faire si il n'avait pas été rattrapé par la réalité.
Ça n'était pas lui, il se risquait à agir bêtement, sans réfléchir, et au réveil il aurait été contraint d'en accepter les conséquences.
Son regard se détourna pour retrouver le bois foncé de la porte dont il saisit la poignée. Lentement, il s'engouffra sans les entrailles de l'immense demeure, la porte se refermant derrière lui.
Au final, c'était de loin la pire nuit qu'il était en train de passer au sein de cette école.